dimanche 11 novembre 2007

Il reste du civet...

mardi 24 juillet 2007


Je soulève un lièvre


Ils sont entre une dizaine et une vingtaine (je ne sais pas, je passe trop vite), dans un assez petit triangle d'herbe, avec deux arbres et un gros buisson, pour faire de l'ombre (je suppose).

Ils ne bougent jamais, malgré le mouvement et le vacarme, et les odeurs - mais on ne sait pas s'ils sentent les odeurs, ni s'ils perçoivent le bruit que nous faisons.

Le passant ultra-rapide suppose qu'ils sont nés là, qu'ils n'iront jamais ailleurs. Il n'est pas sûr, le passant, il n'a pas trop le temps de s'intéresser à eux, même s'il les voit tous les jours, entre six et huit heures du soir, approximativement.

Il semble évident que, pour eux, il n'y a pas d'ailleurs. Pas de champ. Pas de pré. Pas de forêt. Rien. Juste ce petit triangle d'herbe, saturé d'odeurs d'essence, vacarmisé 24 heures sur 24 heures. Vous bougeriez, à leur place ? Et pour aller où ? La mort est devant, elle est aussi derrière - et, sur les côtés, il n'y a rien. D'ailleurs, il n'y a pas vraiment de côtés.

Vous êtes né dans un triangle d'herbe, c'est votre lot, il en vaut un autre - le monde est un triangle, il n'y a pas à sortir de là.

Vous êtes un lapin. Né par hasard, entre l'autoroute A 13 et une bretelle d'accès à la même : dans ce triangle, oui. Un peu plus loin, deux ou trois cents mètres, il y a un autre triangle exactement semblable - les hommes de la DDE l'ont voulu ainsi, on peut supposer. Mais, dans celui-là, aucun lapin - pas le moindre, vraiment, même en ralentissant et en regardant mieux.

On ne sait pas pourquoi. Ni les humains, ni les lapins - de ce point de vue, on est à peu près pareils : on ne sait pas le pourquoi des choses, le comment des triangles. La différence, c'est que les bipèdes passent très vite, parce que quelque chose - ils ne savent pas quoi, mais ils y vont - les appelle ailleurs.

Alors que, jour après jour, les lapins restent là, dans leur triangle herbu, immobiles, jamais sautillants, résignés au bruit, à notre fréquentation rapide, au-delà de la peur (on dirait), et l'air un peu triste.

C'est en tout cas l'impression qu'ils donnent - mais il est préférable de ne pas s'attarder sur eux et de regarder plutôt devant soi, si on veut arriver sain et sauf dans son propre triangle - c'est un conseil d'habitué.

1 commentaire:

  1. Ca donne faim vos histoires de civet au lièvre, si vous voyez des oreilles qui dépassent la prochaine fois gardez m'en un c'est juste pour goûtez à des produits naturels non trafiqués.

    Pour envoyer ce message j'ai dû recopier "pptq", vous imaginez le genre d'horreur que je suis obligé d'écrire pour si peu ?

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.