jeudi 1 août 2013

Le Merle


Le merle est un con, mais on l'aime bien tout de même. Il est con parce que, nanti d'une paire d'ailes en état de marche – ce dont tout humain rêve dans ses rêves, ne dites pas le contraire –, il met une étrange obstination à sautiller dans l'herbe comme un crétin, avec ces curieux petits mouvement de la tête, plutôt que de voler : même les chats les plus affutés à la chasse sont effondrés de le voir et s'abstiennent de le poursuivre – quant aux chiens n'en parlons même pas.

Il est néanmoins sympathique en raison de son côté “adjudant de carrière” qui le pousse à régenter toute la faune volatile  ; il a quelque chose de scrogneugneu et bravache, culotte de peau, dans sa manière de sonner le réveil au clairon, à peine le jour nouveau menace-t-il, et de donner de la voix aussi à la tombée de la nuit pour envoyer tout le monde au lit ou au nid – et ça file droit, jamais un semblant de rébellion. Le merle mériterait une moustache, un képi et un tambour, le merle est un Français de la France d'avant, un échappé d'un film de Jacques Tati ; on prétend même qu'il aurait donné la réplique à Louis de Funès au temps de sa splendeur. Il a beau être noir, il est de chez nous ; d'ailleurs sa femme est toute pâlotte, elle a à cœur de compenser, suppose-t-on, les ténèbres plumitives de son époux trompettant. 

Le merle est ridicule la journée durant, surtout si on le compare aux grands aigles planants ou aux mouettes hystériques et braillardes – très post-modernes, les mouettes, néanmoins assez majestueuses dans leur lutte contre les vents du grand large –, mais il reprend sa dignité en accord avec le soleil, au moment d'inaugurer ou de conclure.

Le merle est con, mais c'est un sage.

16 commentaires:

  1. Je vous trouve bien indulgent vis-a-vis de ce triste connard.

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  2. coté adjudant chef , il donne aussi dans le bivouac saccageur au moment de la bouffe

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  3. Mais je n'ai jamais rêvé d'avoir deux ailes. J'ai rêver de la suppression des "heures administratives" de fermeture des bistros et d'un tas de trucs...

    Je vais vous dénoncer à Suzanne du merlle moqueur.

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  4. Chez nous il y a des perruches. Caquetantes et nombreuses elles sillonnent les airs en escadrilles ordonnées. Certains raconte qu'elles se sont échappées de Roissy il y a quelques années. Ce n'est qu'une légende urbaine de ces pays de Pies noires et blanches toujours aussi mesquines,roublardes,hâbleuses et voleuses ces emplumées de souche.toute les mamies du coin achètent des boules de graisse pour que ces diamants verts subsistent l'hiver. Ce qui profite au merles qui n'ont plus beaucoup de jardins...;.)

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  5. Mais au moins n'est-il pas jeté hors du nid "à grands coups de pompe dans le fondement" ou bien ?
    Mais peut-être est-il tout de même "embarrassé d'un membraque si turgide" qu'il en est empêché de voler ?
    Savoir si jazzman nous donnera son point de vue ?

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    1. Vous savez que je dois me faire aussi discret qu'un éléphant rose dans un supermarché de porcelaine en banlieue sensible, alors ne secouez pas le pédalo, évitons les prises de bec.

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  6. je préfère le Merlot au merle, le texte est distrayant.

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  7. Est-ce ici, cher néo-Buffon, un discret hommage au génial " Les oiseaux sont des cons " du génial Chaval ?

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  8. Pas plus tard que ce matin, ce salopard emplumé a profité de ce que je dormais pour me réveiller à l'aube. Je le hais !

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  9. Jules Renard est mort (hélas!). Heureusement, vous prenez sa succession.

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  10. Pas si couille que ça puique le merle est un ex-migrateur. De plus, c'est le premier oiseau des champs à s'être installé en ville (Kundera le fait remarquer dans un de ses livres). Bref, il sait s'adapter et reste le premier emplumé à avoir capté qu'il y a toujours à bouffer dans les cités.
    Au moyen-âge, on se moquait déjà de lui parce qu'il sonnait l'alarme quand le prédateur était déjà sur lui.
    On allait même (à la campagne), jusqu'à en faire le symbole de la bêtise.
    Néanmoins il ornait les armoiries des ducs de Lorraine.
    Sa femelle est brune, pas pâlotte.

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  11. Robert Marchenoir3 août 2013 à 13:56

    Je m'esscuse, mais le koala est largement plus con que le merle.

    Le koala a un petit pois dans la tête. Littéralement. Il a 40 % de sa boîte crânienne remplis d'eau, et son cerveau a la taille de deux cerneaux de noix.

    Il est tellement con qu'il a décidé de ne se nourrir que d'eucalyptus, et d'une certaine espèce, encore. Résultat, il ne peut survivre pratiquement nulle part, sauf dans une minuscule partie de l'Australie.

    Le koala est tellement con qu'il en oublie de boire. En temps normal, ça ne lui pose pas de problème, car il s'hydrate avec les feuilles d'eucalyptus. Par temps très sec, en revanche, celles-ci ne contiennent plus assez d'eau, et il est contraint de venir mendier de l'eau à la gamelle, comme un vulgaire clébard, chez des types qui non seulement vivent la tête en bas, mais font honte au bricolage international en essayant de faire tenir un abreuvoir avec du scotch dans leur jardin.

    En plus, contrairement au merle, le koala ne chante même pas. Et heureusement, parce que quand il le fait, ce n'est pas franchement gracieux.

    Ceux qui stigmatisent le merle mériteraient de se faire réveiller par un troupeau de koalas en train de braire dans leur jardin.

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    1. Le cri du Koala est assez similaire au rot du Chinois en fin de repas.

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  12. on peut toujours critiquer ce qu'on veut, y compris le merle qui est non seulement un musicien inspiré mais qui de plus, comme beaucoup d'oiseaux mâles, est voyant et bruyant (alors que la femelle est discrète) pour attirer vers lui les prédateurs et sauver ainsi la femelle et les oisillons. Parmi vous, les mecs, que lèvent la main ceux qui en feraient autant ? Vous voyez : pas un seul.
    Quant aux mouette braillardes, ce ne sont pas des mouettes : ce sont des goélands, un oiseau que personne n'aime car il est envahissant et extermine les autres oiseaux en bouffant leurs œufs.

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.