mercredi 3 septembre 2014

Le polygraphe tous terrains


Matinée agitée, mais finalement plus agréable à vivre que celles des mercredis de modèle courant, où je m'ennuie à cent sous de l'heure (non, un peu plus tout de même). Je suis arrivé à Levallois à dix heures moins le quart (l'heure “réglementaire”, ce jour de bouclage, est neuf heures…). J'étais encore dans le hall lorsque j'ai croisé deux reporters de FD, qui ont eu l'air content et presque soulagé de me voir ; ils se sont empressés de me dire que j'étais attendu ; de quoi j'ai déduit qu'il allait me falloir écrire un article pour le numéro en voie de terminaison, l'heure limite pour envoyer les papiers au secrétariat de rédaction étant midi (mais sachant aussi que, comme tous les secrétariats de rédaction, le nôtre s'est donné une marge de manœuvre : midi n'est que la dead line officielle). À peine suis-je sorti de l'ascenseur qu'un autre reporter m'accueille avec le même empressement : les choses ont l'air sérieuses…

Dans la salle de conférence, où sont réunies mes puissances tutélaires, je suis reçu comme un messie ; Philippe B. me tend trois photocopies reproduisant un assez long article de journal, d'après ce que je vois au premier abord. Et, au deuxième abord, en effet c'est ça : le papier que Paris Match consacre cette semaine au livre de Mme Trierweiler. « Lis-le et reviens me voir juste après », me dit Philippe. Je prends tout de même le temps de faire le café, lis la chose, stabilo jaune en main, et trouve une idée d'attaque ; je reviens dans la salle de conférence : elle est vide ; je passe dans la pièce suivante, qui est le bureau directorial. Philippe B y est, avec Gabriel, le chef des informations. Après nous être rapidement mis d'accord sur l'angle de l'article (celui auquel j'avais pensé une minute plus tôt, qui a été ratifié sans sourciller), je pose la question rituelle : « Combien ? » La réponse du maître de l'Olympe vient tout de suite : « Huit feuillets… » Je le dévisage avec attention : non, il n'a pas l'air de plaisanter. Il précise : « On en fait trois pages… » Je regarde l'heure : dix heures dix ; j'ai douze mille signes à écrire…

Après une heure de claviotage intensif, je prends tout de même le temps de descendre fumer une cigarette, avec un demi-gobelet de café ; j'en suis à sept mille signes. Je rencontre deux autres fumeurs de FD, dont Anthony, l'adjoint de Gabriel : tous les deux m'entourent comme si j'étais entre le dixième et le onzième round d'un combat contre Mike Tyson ; je m'attends à ce que l'un d'eux me débarrasse de mon protège-dent, pendant que l'autre épongera mon mâle et ruisselant visage. Je ne fume que la moitié de ma Pueblo et remonte.

À midi moins le quart, j'expédiai 12 023 signes dans les boitamels des gens concernés. Je dois dire que, si je n'en tirai aucune fierté, j'étais tout de même fort content d'avoir “tombé” ces huit feuillets en une heures et demie ; lesquels feuillets, à la relecture, ne m'ont pas paru démériter. Je me suis souvenu que, voilà presque trente ans, mon directeur de l'époque, Louis Gros, lorsqu'il avait à me présenter à des visiteurs du journal, m'appelait son polygraphe tous terrains.

La conclusion de tout cela, ajouté au fait qu'il fait un temps presque estival, est que j'ai mis tout à l'heure deux bouteilles de riesling au frais…

47 commentaires:

  1. 12.000 signes sur un article qui parle du livre de Valoche ?

    Effectivement, vous méritez vos bouteilles de Riesling....

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  2. Seul le dernier paragraphe a retenu toute mon attention

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  3. il y a 23 signes de trop.

    Cela étant je ne vois pas ce qu'on peut dire en huit feuillets sur un truc qui est déjà étalé dans la presse avant d'êtr sorti...

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    1. En réalité, pour une raison simple mais que je n'ai pas envie d'expliquer, il n'y avait qu'UN signe de trop !

      (Ce qui est un pur hasard évidemment.)

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    2. La raison m'intéresse mais le manque d'envie se respecte.

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    3. En tête d'un article, pour des raisons de classement informatique, on lui donne un titre, qui commence par les deux derniers chiffres du numéro de FD pour lequel on travail. En l'occurrence,b mon titre était : 49Trierweiler

      Si vous comptez comme moi, cela fait 12 signes qui, bien entendu, n'entrent pas dans le décompte total de l'article. Lequel faisait donc (signature comprise, car elle compte) 12 001 signes.

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  4. waoh ce qui nous fait la bouteille à 6011 signes
    a bientot

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    1. 6011,5, s'il te plaît !

      (Et non, pas à bientôt : vous ne verrez que Catherine…)

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    2. Tiens ! Fidel ! J'en profite pour m'excuser, il a laissé des commentaires sur tous mes blogs, hier, mais j'ai eu la flemme de répondre.

      Cela dit entre nous.

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    3. Ben, ne vous gênez pas, les deux vieux débris ! Allez-y, racontez-vous vos souvenir des tranchées de 14 chez moi !

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    4. On n'est pas des vieux débris mais votre caution de gauche.

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    5. 6000.5 signes la bouteilles si je peux me permettre (j'ai lu l’explication de Didier...)

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  5. Ah, et quand sera publié ce morceau de bravoure? J'aimerais bien lire.
    Et une fois de plus vous me donnez grand soif après une épopée chirurgicale...

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    1. On ne picole pas pas après après une opération, bordel !

      (Enfin, pas tout de suite.)

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  6. A la réflexion j'aurais écrit "tout terrain" et "protège-dents".
    Concernant ce dernier, il vous rendra au moins le service que personne ne pourra vous confondre avec un "sans dent" ou "sans dents".

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    1. Vous avez raison pour "protège-dents". Pour "tous terrains", c'est discutable.

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  7. J'ai mis un point d'honneur à ne pas acheter le Paris-Match dont vous parlez, mais je mentirais si je disais que que je n'aimerais pas lire vos 12 023 signes sur le sujet.
    Croyez-vous que FD vous autorisera à les publier sur votre blog, ou bien ?

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    1. Mes 12 000 signes n'ont aucun intérêt. En revanche, je ne comprends pas comment on peut mettre un "point d'honneur" à ne pas acheter un journal…

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  8. "Cela étant je ne vois pas ce qu'on peut dire en huit feuillets sur un truc qui est déjà étalé dans la presse avant d'être sorti"

    Rien justement.
    C'est une façon de mépriser le lecteur.

    Anne-Laure

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  9. Avouez Monsieur Goux : tout votre billet d'aujourd'hui n'est fait que pour mettre de la publicité clandestine pour les cigarettes 'Pueblo" !

    Ok, c'est nul, je sors...

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    1. Non, non, c'est très bien, les Pueblo : ça vous donne le cancer comme les autres, mais avec plus de bonne conscience.

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  10. Huit feuillets en une heure et demie : mazette... J'ai connu naguère (ou jadis?) un certain Philippe Bernert que l'on avait surnommé "Monsieur six feuillets à l'heure". C'était un feuilletonniste stakhanoviste, inventeur du "chef d'orchestre clandestin" dont il assaisonnait (presque) tous ses papiers. Vous égalez presque son record.

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    1. Je vous demande pardon : je n'égale pas son record, je le pulvérise ! Quand j'écrivais des Brigade mondaine, je dépassais, dans mes bons jours, les sept feuillets à l'heure. Ce qui me permettait de boucler un roman en quatre jours.

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  11. Le style ressemble à du roman noir : Si on ajoute une boisson à base de grains, des patronymes exotiques, des initiales à la place de Levallois...

    Amike
    PS: Il manque la secrétaire incendiaire...

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    1. Boisson à base de raisin et non de grains, désormais…

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  12. Vous sentez tel " Le Golem" mais qui vous essuie votre visage, pour le vin une vendange tardive.

    12000 signes, vous êtes le batelier de FD;

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    1. Le vin n'était pas de vendange tardive… et la seconde bouteille était infâmement bouchonnée.

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  13. Rien à voir avec le sujet, mais j'ai un problème avec votre blogroll : lorsque je clique sur un nom la page qui s'ouvre est remplie de signes cabalistiques (comme un programme informatique...).
    Le reste est OK.
    Geneviève

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    1. En effet c'est étrange ! D'autant plus que personne d'autre que vous ne m'a signalé un quelconque problème. Je crains fort de ne rien pouvoir faire pour vous…

      (Vous avez essayer de changer de machin bidule (Safari à la place de Firefox ou l'inverse) ?)

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    2. Je viens de relancer la machine et ça fonctionne normalement (j'ai Google Chrome). Bizarreries de l'informatique !
      Geneviève

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    3. Ça n'a que peu de rapport, mais j'ai découvert aujourd'hui, après plus de deux ans (ou trois) de laborieuse industrie sur Facebook, qu'à peu près une personne sur dix comprenait qu'il fallait cliquer sur les liens que j'y déposais comme un bon petit soldat de réclame. Ils voient une image (qui est un lien, donc), ils regardent, et ils likent. Autant dire que ça ne sert à rien du tout. C'est un peu comme si l'on déposait un téléviseur sur les gens et qu'ils se contentaient de dire : « Oh, t'as vu, Solange, on nous a donné un joli objet. Sympa, non ? »

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  14. Bravo ! Bravo, sincèrement bravo !

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  15. Je veux bien retirer un bravo, alors, voire deux... mais c'est quand même bien.

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  16. et ça sort qu'on que l'on puisse se régaler ?

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  17. Il sort demain ; mais l'acheter me semble tout à fait inutile…

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    1. Vous parlez du livre de Mme Trierweiler ou de votre article ?

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  18. "Claviotage intensif"la disposition des signes sur clavier fut concue de maniere a ralentir des doigts trop vifs qui enrayer la mecanique de la machine,a l ere de l electrique on peut imaginer un clavier ou les touches les plus usitees reviendraient pour accroitre la rapidite. .Idee saugrenue n y accorder pas d importance!ni aux fautes..
    Dom.

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    1. Encore un idée fausse qu'on répète sans savoir, pour avoir l'air de celui (ou celle) à qui on ne la fait pas.
      La place des lettres a été choisie pour que des lettres consécutives (en anglais) proviennent si possible de points éloignés car les lettres proches ont tendance à s'emmêler sur une machine mécanique.
      Paradoxalement cela permet justement d'enchaîner très vite des combinaisons qui font appel aux deux mains.

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  19. Bon bon...Jazzman..j avais lu cette explication sur l ordre des touches de clavier dans le "pourquoi des pourquoi"un livre au titre allechant de phillipe Vandel si j ai bonne memoire.Je croyais detenir une solution miracle,une astuce quasi divine!
    Merci de votre eclaircissement.
    Dominique.

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