samedi 28 janvier 2017

Tu reviendras à Robert Rodriguez


N'hésitons pas à le dire liminairement (Catherine devrait rapidement m'appeler son liminaire céleste, je pense) : Robert Rodriguez est le meilleur cinéaste vivant ; en tout cas celui qui donne naissance aux films les plus réjouissants – ou jubilatoires, pour jargonner comme mes ex-confrères. Par Wikipédia, j'apprends qu'il a vu le jour en 1968 et mesure 1,87m : cela lui fait un point commun avec votre serviteur, je vous laisse deviner lequel, hélas. On apprend aussi que, né à San Antonio, Texas, il est d'ascendance mexicaine, ce qui ne surprendra personne, au vu de son nom ridicule (on ne peut pas s'appeler Robert Rodriguez, bon sang ! pas plus que Marcel Kurosawa ou Karl-Heinz Perrichon).

Depuis un quart de siècle, notre Chicano-texan a œuvré dans différents genres. Les deux où il réussit le mieux sont d'une part ce que j'appellerais le burlesque horrifique, et d'autre part une ultra-violence volontairement outrancière, qui n'est pas sans rappeler Bip-Bip et Vil Coyotte, ou encore certains dessins animés de Tex Avery. Dans ce dernier genre, je recommanderai le diptyque Machete et Machete kills, avec Danny Trejo, qui est par ailleurs le cousin de Robert. Comme souvent chez Rodriguez, on y croise d'assez nombreuses vedettes (De Niro, Steven Seagal, Don Johnson, Bruce Willis, Quentin Tarantino et d'autres), visiblement ravies de venir camper de véritables ordures durant deux ou trois scènes. On peut aussi se risquer du côté de Desperado, dont la vedette est Antonio Banderas.

Pour ce qui est du burlesque horrifique, deux titres s'imposent ; d'abord Une nuit en enfer, film de vampires totalement à l'ouest (du Pecos) mettant en scène George Clooney, Harvey Keitel, Juliette Lewis et Quentin Tarantino (avec une brève mais commotionnante apparition de Salma Hayek), qui se retrouvent coincés dans une sorte d'immense “bar à sang” où ils doivent tenir jusqu'au lever du jour ; ensuite, on ne manquera sous aucun prétexte Planète terreur. Comme le titre le suggère, il s'agit d'un hommage aux séries B des années soixante et soixante-dix, que l'on projetait dans les cinémas dits “de quartier” (rappelons pour les moins de 50 ans qu'à l'époque le mot “quartier” s'employait au singulier et n'était nullement synonyme de casbah ou de village nègre). L'hommage est aussi réaliste que possible, puisque l'image a tendance à trembler un peu (par moment…) et à être traversée de zébrures et de points lumineux intempestifs (là encore, à certains instants judicieusement choisis). Le clou est, aux deux tiers du film, lorsque la pellicule prend carrément feu et qu'un panonceau intercalaire nous prévient qu'une bobine est manquante ; moyennant quoi, effectivement, on se retrouve avec un gros “blanc” dans le déroulement de l'intrigue, des personnages qui étaient séparés se retrouvent au même endroit, d'autres qui vaquaient sur leurs deux jambes agonisent sur un grabat, etc., sans qu'aucune explication ne soit donnée, ce qui est rigoureusement sans importance, vu le côté foutraque du scénario. Dans cette joyeuse pochade, où un gaz secret fabriqué par un ignoble militaire (Bruce Willis) transforme les gens en monstres pustuleux, avides de bouffer votre cervelle (et davantage si gros appétit), on retrouve le petit Freddy Rodriguez, qui n'a pas de lien de parenté avec Robert et que connaissent bien ceux qui ont regardé la série Six feet under ; il y a aussi l'indispensable Quentin Tarantino, en violeur psychopathe. On notera que, pour accroître encore le côté “séance de quartier”, Rodriguez propose, au début du film, une bande-annonce, avec Danny Trejo ; laquelle bande deviendra Machete trois ans plus tard : c'est probablement le seul cas, dans l'histoire du cinéma, où une bande-annonce a entraîné la réalisation du film lui correspondant, et non l'inverse.

Si après ça vous n'êtes pas convaincu de vous y précipiter, vous pouvez toujours vous rabattre sur l'un ou l'autre de ces films français “de fille”, mettant en scène des trentenaires-qui-s'interrogent-sur-leur-couple-et-leur-désir-d'enfant : c'est tout ce que vous aurez mérité.

13 commentaires:

  1. Non mais attendez-là : je m'arrête de lire à la troisième ligne. Vous êtes donc né en 1968, parce que si vous mesuriez 1m87 on l'airait déjà su ! Alors expliquez-nous par quel miracle, ou entourloupe, ou tour de passe-passe, ou je ne sais quoi, vous avez réussi à vous faire mettre à la retraite ?

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    1. J'ai demandé les conseils de Mme Hidalgo…

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    2. Le port obligatoire de l'étoile jaune éviterait ce genre de dialogue superflu, je ne suis pas seul à le dire...

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    3. La modestie du Maître lui interdit de dire que du haut de ses 1m 87, il ne craint pas ce genre de films sous ecstasy ou LSD, étant donné que lui-même a vaillamment "fait" 68... il est des nôtres !

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  2. "Une nuit en enfer":jamais autant rigolé, j'ai cru que hémoglobine allait déborder de l'écran.
    Machete , il fait aussi de la pub pour des tortillas.
    J'espère qu'une chaine du câble passera "Planète terreur".

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    1. C'est tout le malheur que je vous souhaite !

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    2. Sur Amazon, vous pouvez avoir le DVD pour 6,09 €, c'est tout de même à la portée d'un bénéficiaire du revenu minimum d'existence.

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  3. 'tain, mais vous donneriez vraiment envie de les voir, ces bouses (qui sous votre plume apparaissent dé-bousifiées) ! Quel talent !

    (Et bonne année 2017, car il n'est pas trop tard pour le dire, n'est-ce pas ?)

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    1. Mais ce ne sont pas des bouses !

      (Et bonne année pour vous aussi.)

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  4. Qu'un grand garçon de 1m89, qui avoisine sans doute encore les cent kilos s'amuse en regardant des films du genre "burlesque horrifique" a de quoi laisser pantois !
    Si vous aimez les histoires de violeurs psychopathes qui aiment découper les femmes en morceaux et leur manger le foie, lisez donc le livre de l'historien Ivan Jablonca intitulé : "Laëtitia ou la fin des hommes" (Editions du Seuil)

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    1. Pas 89, 87 : j'ai perdu deux centimètres aux alentours de la cinquantaine…

      (Quant à votre bouquin pénible, vous pouvez vous le garder : moi, je retourne à Rodriguez.)

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  5. Que vous aimiez le cinéma de Robert Rodriguez et bien la preuve définitive que, quoi qu'en dise certains, vous êtes un homme bien !

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  6. non, je vous conseillerai plutot le "dernier film de banlieue" en date, l'histoire (vraie le biopic est a la mode) d'un fils d'"immigrés illettrés" de banlieue qui se met en tete (et qui réussi) de gravir l'everest sans aucune expérience ou presque

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La boutique est rouverte… mais les anonymes continueront d'en être impitoyablement expulsés, sans sommation ni motif.